René DE NICOLAY
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René de Nicolay est historien de la philosophie et philosophe politique. Sa thèse (ENS – Princeton, 2022) s’intéresse au regard porté par trois philosophes anciens (Platon, Aristote et Cicéron) sur le rapport des sociétés démocratiques de leur temps avec la notion de liberté. Agrégé de lettres classiques (2017) et titulaire d’un Master 2 d’histoire ancienne (EPHE, 2014), il étudie comment ces philosophes ont, chacun dans leur contexte, tenté de définir un équilibre entre la liberté garantie par la cité (liberté politique, liberté privée) et les autres biens que, selon eux, la cité doit viser (sagesse pratique, amitié civique).
Comme philosophe politique, il s’intéresse à la façon dont les sociétés démocratiques peuvent atteindre un équilibre entre liberté (comme auto-détermination du peuple et comme marge d’indépendance privée garantie aux individus) et d’autres biens, comme la cohésion sociale et les droits des minorités. Dans cette perspective, il enseigne en 2023-2024 à l’ENS un séminaire sur le philosophe canadien Charles Taylor.
René de Nicolay a par ailleurs enseigné à Princeton (2019-2020), à l’ENS (2020-2023) et au CPES (2022-2023).
Projet : Essence et contingence de la démocratie : Averroès, Al-Fārābī et les Anciens
L’équipe Translitterae offre un cadre pour étudier la réception des thèses platoniciennes sur la liberté démocratique chez deux philosophes islamiques, Al-Fārābī et Averroès.
Al-Fārābī (ca. 870-950) offre, par rapport à Platon, une nouvelle vision de la démocratie. Celle-ci n’est plus le régime hédoniste décrit par Socrate dans la République, où les citoyens vaquent à la satisfaction de leurs désirs, si variés soient-ils ; elle est un régime pluraliste, où des individus aux conceptions du bonheur différentes peuvent coexister.
Averroès (1126-1198) poursuit et critique l’approche d’Al-Fārābī. Il la poursuit en précisant les conditions de possibilité du pluralisme, proposant la notion de « lois primaires », normes légales élémentaires qui empêchent les crimes et délits de droit commun d’être commis. Ces lois ont pour fonction de défendre la propriété et la famille : la démocratie d’Averroès est, bien plus que celle d’Al-Fārābī, le régime qui protège les foyers privés.
Averroès critique aussi la vision d’Al-Fārābī, en refusant de placer la démocratie dans une séquence généalogique, comme le faisait Al-Fārābī à la suite de Platon. La démocratie retrouve chez lui sa contingence, plus conforme à la variété des événements historiques qu’il évoque dans son Commentaire à la République de Platon, rédigé vers 1180 et préservé dans la traduction en hébreu réalisée par Samuel ben Tibbon autour de 1320. Le projet propose la première traduction française des passages du Commentaire relatifs à la démocratie.
Crédit photo : Jean-Christophe Husson