L’Atlantique argentique : circulations photographiques XIXe-XXIe siècle
Porteur du projet : Didier Aubert (THALIM)
On le sait, la question des origines de la photographie a donné lieu à des hypothèses concurrentes, ancrées dans les particularismes et les revendications nationales. Ce que François Brunet appelait « l’idée de photographie » semble avoir surgi presque en même temps sur toutes les rives de l’Atlantique. Depuis, les photographes et leurs images ont contribué de façon décisive aux échanges entre l’Europe, l’Afrique et les Amériques.Le colloque « Atlantique argentique » ambitionne d’esquisser une cartographie de la construction photographique des cultures atlantiques. La circulation matérielle des images et des publications, les voyages des praticiens professionnels et amateurs, le marché des matériels et l’organisation d’expositions internationales ont été des vecteurs importants d’échanges commerciaux et culturels. Le destin des photographies rassemblées par le collectionneur Thomas Walther, présentées cet automne au Jeu de Paume en collaboration avec le MoMA de New York, en est un exemple emblématique.Ces traversées ont d’abord touché les grandes capitales de l’Atlantique et les ports. Elles ont relié les patries d’origine des migrants et les frontières de l’exil, les champs de missions et les champs de bataille, les hauts-lieux du tourisme et les horizons méconnus. Pour ce faire, les photographies ont voyagé par bateau, par câble, par avion, et même dans une célèbre valise mexicaine. Ce sont les voyages et les correspondances, les échanges institutionnels, les circuits de l’art et de la culture qui ont ainsi contribué à fabriquer ou à maintenir des liens familiaux, amicaux, politiques ou religieux dans l’ensemble de la région, nourrissant les histoires communes d’un rivage à l’autre.Cet Atlantique des images matérialise à la fois le lien et l’éloignement, la communauté et la séparation. Il a façonné des empires, nourri la propagande et le commerce, élaboré l’utopie d’une « famille humaine » commune au lendemain de la Seconde guerre mondiale.Les interventions de la première journée s’attacheront donc à dessiner la contribution des images photographiques au paysage visuel atlantique, ce « monde image » (image world) évoqué par Deborah Poole pour décrire l’économie visuelle liant les Andes, l’Afrique, l’Europe et les Etats-Unis. La deuxième partie du colloque, articulée autour de l’exposition La collection Thomas Walther, reviendra sur les circulations du modernisme photographique, sur la constitution des réseaux artistiques, et sur la manière dont l’Atlantique argentique se diffuse, désormais, sous la forme d’un océan numérique.Colloque international sous la direction d’Ada Ackerman, Didier Aubert, Clara Bouveresse et Anaïs Fléchet, organisé par la Maison des Sciences de l’Homme Paris Saclay, l’UMR Théorie et histoire des arts et des littératures de la modernité (THALIM), l’école doctorale Translitterae, le Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines (CHCSC), le laboratoire Synergies Langues Arts Musique (SLAM), le Center for Research on the English-speaking World (CREW), l’Institut des Amériques et le Jeu de Paume dans le cadre du programme ANR Transatlantic Cultures.