Les éruptions historiques de l’Etna, texte et terrain : deux exemples
par Jean-Claude Tanguy (chercheur CNRS émérite, UMR 7154)
La description la plus ancienne d’une éruption de l’Etna se trouve dans la première Ode pythique de Pindare, qui décrit une éruption contemporaine de la bataille de Platées (479 avant J.-C.). Le poète y raconte que « la nuit, un fleuve rouge de flammes roule vers les profondeurs de la plaine liquide les rocs retentissants » (traduction d’Edouard Sommer, Paris, Hachette 1847).
Cette coulée qui atteignit la mer, aujourd’hui identifiée sous le village côtier de Santa Tecla (datations par archéomagnétisme et 226Ra-230Th, Bull. Volcanol. 70, 2007, 55-83), fut initialement datée par erreur à l’année 396 avant J.-C. sur la base d’un récit de Diodore de Sicile, qui mentionne une coulée récente barrant alors la route à l’armée carthaginoise en marche vers Syracuse.
Dans la Pharsale, épopée de Lucain (39-65 après J.-C.) qui retrace la guerre civile entre César et Pompée (49-45 avant J.-C.), le poète mentionne, parmi les calamités survenues du temps de la guerre, une éruption de l’Etna, qui ne porta pas ses flammes vers le ciel, mais descendant du sommet le feu fendit le côté en direction de l’Hespérie, c’est-à-dire l’Ouest selon les Anciens.
L’étude de terrain et les datations par archéomagnétisme et 226Ra-230Th (JVGR 304, 2015, 265-271) montrent que les éruptions importantes compatibles avec le récit de Lucain sont celles qui ont produit les grands cônes de scories des monts Minardo et Ruvolo, sur le flanc occidental de l’Etna.