Le contenu anthropologique de textes littéraires (Vang bóng một thời, Tập án cái đình, v.v)
The anthropological content of literary texts (Vang bóng một thời, Tập án cái đình, v.v)
AU DÉBUT du XXe siècle, une véritable révolution anthropologique eut lieu dans le Vietnam colonial. La découverte d’autres populations et d’autres cultures que celle de la Chine, Empire Céleste et centre du monde, fut concomittante avec la prise de conscience du retard du Vietnam et la nécessité de la modernisation en vue d’une régénérescence. Une génération plus tard, les auteurs de la nouvelle littérature vietnamienne – celle qui s’écrit désormais en vietnamien grâce au quoc ngu, écriture romanisée – interrogent leur société pour mieux la comprendre, mais aussi pour agir sur son évolution. La littérature réaliste fait éclater le monde social vietnamien « traditionnel », décrit d’ailleurs souvent comme « harmonieux » et « éternel » dans des écrits orientalistes. Quant au courant « mœurs et coutume », la description d’un monde en train de disparaître dans le contexte colonial amène des écrivains à réfléchir sur leur propre culture. Enfin, toute une partie de cette littérature en quoc ngu, allant des récits de voyages aux nouvelles et romans, fait connaître au lecteur, souvent citadin et vietnamophone, l’existence d’autres ethnies qui vont intégrer, à l’indépendance du pays, la construction d’un « Vietnam des 54 ethnies ».
Nguyen Phuong Ngoc est Maîtresse de conférences HDR, responsable de la section de vietnamien au Département d’Études asiatiques de l’Université Aix-Marseille. Après une thèse de sociologie « A l’origine de l’anthropologie au Vietnam. Recherches sur les auteurs de la première génération » soutenue à l’Université de Provence en 2004, elle continue à travailler sur les intellectuels vietnamiens et sur l’introduction des idées scientifiques et artistiques dans le Vietnam colonial (première moitié du XXe siècle). Elle s’intéresse à l’émergence et au développement d’une littérature vietnamienne moderne en écriture romanisée « quoc ngu ».
AT THE BEGINNING of the 20th century, a true anthropological revolution took place in colonial Vietnam. The discovery of other populations and other cultures than that of China, the Celestial Empire and center of the world, was concomitant with the awareness of Vietnam’s backwardness and the need for modernization in view of regeneration. A generation later, the authors of the new Vietnamese literature – that which is now written in Vietnamese thanks to quoc ngu, a romanized script – question their society in order to better understand it, but also to act on its evolution. Realistliterature breaks down the « traditional » Vietnamese social world, often described as « harmonious » and « eternal » in orientalist writings. As for the « mores and customs » current, the description of a world disappearing in the colonial context leads writers to reflect on their own culture. Finally, a whole part of this literature in Quoc Ngu, going from travel stories to short stories and novels, introduces the reader, often urban and Vietnamese-speaking, to the existence of other populations which will integrate, at the independence of the country, the construction of a « Vietnam of the 54 ethnic groups ».
Nguyen Phuong Ngoc is a senior lecturer and head of the Vietnamese language section in the Department of Asian Studies at the University of Aix-Marseille. After a thesis in sociology « At the origin of anthropology in Vietnam. Recherches sur les auteurs de la première génération » (Research on the authors of the first generation), defended at the University of Provence in 2004, she continues to work on Vietnamese intellectuals and on the introduction of scientific and artistic ideas in colonial Vietnam (first half of the 20th century). She is interested in the emergence and development of a modern Vietnamese literature in romanized « quoc ngu » script.