Le philosophe, le géomètre et le juste :
Léon Brunschvicg et les débuts de l’entreprise intellectuelle
de la Revue de métaphysique et de morale
par Stephan Soulié (Centre d’histoire sociale du XXème siècle)
En participant à l’aventure intellectuelle de la Revue de métaphysique et de morale, fondée en 1893, le jeune Léon Brunschvicg défend la légitimité universitaire et la fonction morale et civique de la philosophie comme discipline ouverte sur la cité, solidaire des sciences mais jalouse de son autonomie. Le philosophe doit dialoguer avec le « géomètre » et le « juste » sans se confondre avec ces deux figures. Si Brunschvicg joue un rôle de second plan dans la fabrique quotidienne du périodique co-dirigé par ses amis Xavier Léon et Élie Halévy, il contribue par la plume à la définition d’un esprit de revue au service d’un spiritualisme idéaliste et rationaliste adversaire tant du positivisme que du mysticisme. Des controverses dans lesquelles Brunschvicg est engagé durant les premières années de la Revue se dégage un thème central de son « intellectualisme » : l’exigence de « sincérité philosophique » articulé à la « méthode d’immanence ».