Léon Brunschvicg penseur de la déchirure
par Thierry Leterre (Miami University John E. Dolibois European Center (MUDEC) in Luxembourg)
La figure de Brusnchvicg est associée à une philosophie du progrès fondée sur celui de la science, et une telle description, aussi sommaire soit-elle, est correcte, si l’on admet deux nuances, et une remise en cause. La première nuance, c’est que les convictions indéniablement progressistes de Brunschvicg sont profondément antisystématiques. Sans que cela soit nécessairement très original à son époque, cela donne à sa pensée de « la » science une profondeur particulière. La deuxième nuance, c’est que la place de cette « science » n’est pas celle d’une activité régionale de la pensée, mais le destin même d’une « conscience » accomplissant la destinée humaine. Lorsque Brunschvicg écrit Descartes et Pascal lecteurs de Montaigne une fracture s’accomplit et une remise en cause se dessine autour d’une lecture rénovée de Montaigne. Celui-ci devient la source d’inspiration d’un rationalisme bien plus averti des déchirures de la conscience que de son progrès en un temps où il est difficile d’y croire.